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Une partie de ma vie de marin de commerce racontée en 140  histoires vécues.

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Ma vie de marin de commerce (Le Figaro)

Le Figaro
Les bienfaits de l'oignon sur les cheveux

Sur le Léda, dernier bateau de mes huit années de navigation, ma femme se trouvait avec moi.

Ce pétrolier, le plus grand de l'époque, avait des aménagements intérieurs modernes. L'équipage disposait d'une salle aménagée en salon de coiffure, et chacun y venait de temps en temps se faire couper les cheveux.

Il n'y avait pas de coiffeur attitré, cela se passait entre nous, les plus doués au maniement de la tondeuse et des ciseaux coupaient les cheveux des collègues qui, à leurs tours, confiaient leur chevelure aux autres.

Ces autres, beaucoup moins habiles, faisaient ce qu'ils pouvaient, et cela me rappelle une anecdote assez plaisante.

Un matin donc, un graisseur demande à un autre de lui couper les cheveux. On ne peut pas dire que le travail était mal fait, mais, dans le cou, il y avait ce que l'on appelle des manques, des coups de tondeuse maladroits qui laissaient apercevoir le cuir chevelu.

Le midi, à l'heure du repas, alors que tout le personnel arrivait petit à petit et prenait place, notre graisseur malheureux avec sa coupe ratée se faisait moquer de lui à chaque table, dès qu'il s'asseyait. Vexé, ne sachant plus où se mettre, il avise notre table, et s'approchant confiant, s'installe tranquillement.

Tous les regards des autres se portèrent sur nous, étonnés que nous n'ayons pas encore manifesté notre hilarité pour ce collègue mais, c'était mal nous connaître car, alors que notre invité tout content de ne pas se faire blaguer se préparait un plat d'entrée avec beaucoup d'oignons, ma femme eut pour ce malheureux une phrase qui fit rigoler toute l'assistance :

-"Vous avez raison de manger de l'oignon, cela aide à la repousse des cheveux ".

 Il nous fit la tête tout le restant du voyage.

 

 

Ma vie de marin de commerce (Nettoyage par le vide)

Nettoyage par le vide
Les pompes à l'eau

Sur l'Isara, pétrolier de trente-deux mille tonnes (un petit, comparé au Léda de deux cent soixante-quinze mille tonnes), les cabines de l'équipage se trouvaient sous le niveau du pont principal. De ce fait, on y accédait de l'intérieur, et les hublots de ces cabines donnaient directement sur la mer. Cet agencement avait des avantages mais également des inconvénients, témoin ce récit.

Un graisseur qui devait débarquer au Havre, après quatre mois de mer, avait demandé au bosco, vers la moitié de son temps à bord, une paire de chaussures (sandales pour la machine, mais qui, neuves, pouvait passer pour correctes).

Il la gardait jalousement, bien rangée dans son emballage, sous sa bannette, à coté d'une tonne de fouillis qu'il se promettait de ranger avant son débarquement.

Justement, deux jours avant le départ, c'est le grand rangement. On ouvre le hublot, et tout ce que l'on ne veut plus, hop, par-dessus bord.

C'est très efficace, mais malheureusement irréversible.

Emporté par l'élan, tout y passe: carton d'emballage vide, canettes vides, vieilles fringues usées, bouquins lus et relus, et... la boîte de chaussures neuves prévues pour le débarquement.

Trop tard, en pleine mer, filant vingt nœuds (trente-huit kilomètres à l'heure), même si le carton flotte un bon moment, qui irait le repêcher ?

Le bosco n'en est pas à une paire de chaussures près, mais voilà, au retour du voyage, son stock est épuisé, plus de sandales. Notre graisseur devra débarquer avec ses anciennes chaussures, usées, percées, sales et pleines de taches de graisse.

Il habitait Marseille, et dut traverser la France en pompes crasseuses.

 

 

Ma vie de marin de commerce (La colle miracle)

   La colle miracle
Colle tout, même les dents

Je ne sais plus à quel âge mes deux dents de devant furent arrachées et remplacées par des dents sur pivots, mais toujours est-il qu'un jour, du coté du golfe Persique, en plein repas, une des deux plaquettes tomba dans mon assiette.

Que faire? prendre le téléphone et demander rendez-vous avec son dentiste ! très drôle. Le prochain port était Le Cap, en Afrique du Sud, une petite semaine de mer, car nous venions juste de quitter le dernier port du Golfe. De sentir une dent de moins dans sa bouche faisait un drôle d'effet.

A la guerre comme à la guerre, se débrouiller avec les moyens du bord ne pouvait pas mieux s'appliquer qu'à ce moment précis. On allait voir ce qu'on allait voir, il ne sera pas dit que je n'aurai rien fait pour me sortir de cet embarras facial.

Nous avons un peu de tout et de tout un peu dans les ateliers, je trouverai bien quelque chose. En effet, mes yeux sont attirés par un tube de colle, deux plus exactement, une colle extraordinaire à en croire la notice, "colle tout sauf le nez". Pas de contre-indications pour les dents, voilà donc ce qu'il me fallait.

Une plaque de verre pour la préparation, un petit peu de produit du tube "A", que Ton mélange avec la même quantité du tube "B", on malaxe bien, et c'est prêt.

Une couche sur ma dent sur pivot, une autre sur la plaquette, on attend dix secondes et on assemble le tout en appuyant fortement. Je me croyais tranquille pour la fin du voyage, mais c'était sans compter sur les molécules chimiques du produit.

Dès le lendemain matin, impossible d'ouvrir la bouche, une paralysie m'en empêchait. Ajoutez à cela des douleurs atroces, des élancements dans la mâchoire qui me rendaient presque fou. Il me fallut attendre quatre jours avant l'escale du Cap pour courir chez le dentiste. Seul le sirop de morphine calmait ma douleur, et me permettait d'assurer tant bien que mal mon service.

L'arracheur de dents fut surpris d'un tel patient dans son cabinet et tenta de m'expliquer que c'était bien la première fois qu'il voyait un cas semblable de toute sa carrière. J'avais apporté la notice du produit néfaste, cela aida mon sauveur qui me fit une piqûre calmant très rapidement la douleur que je ne pouvais plus supporter.

Ensuite, avec son assistante, il eut toutes les peines du monde pour enlever la colle devenue du béton.

Je suis reparti de chez lui avec la pose de ma plaquette effectuée dans les règles de l'art et une bonne engueulade que j'acceptais, trop content de ne plus souffrir.

Trente ans plus tard, le travail tient toujours, mais je ne fais pas visiter.

 

Ma vie de marin de commerce (L'achat d'un tapis)

L'achat d'un tapis
  Dis-moi où tu habites...

Dans les souks du golfe Persique, il fallait que je revienne avec quelque chose d'original, un objet souvenir qui, toute ma vie en le contemplant me rappellerait mes virées lointaines du bout du monde. Mais que choisir ? J'errais dans les étals des marchands, ne sachant que prendre, toutes ces choses déballées étaient plus belles les unes que les autres, je ne savais arrêter mon choix. Un vendeur, sans doute attiré par mon embarras voulut bien me servir de guide dans cette caverne d'Ali Baba. A chaque arrêt devant une merveille, il me décrivait l'objet, en vantant la qualité ou la finition parfaite.

Je jetais mon dévolu au rayon des tapis, et m'y attardais. Mon guide toujours près de moi inlassablement débitait son flot de paroles pour m'aider à choisir celui que j'emporterais pour toujours,

II y avait bien une petite heure qu'il m'aidait dans mes recherches. Il parlait très bien le français car, me dit-il, il passa quelque temps en France pour faire des études de commerce (je le sentais très doué en effet).

-"Du fait de mon séjour en France dans votre beau pays, nous sommes un peu pays", me lança-t-il au bout d'un moment.Je ne voulais pas le froisser, ni le vexer profondément, il avait été un guide parfait, un conseil très éclairé, car j'avais enfin et grâce à lui trouvé le tapis de mes rêves qui, trente ans après orne toujours mon salon de sa présence.

Il fallait par contre que je réponde à cet individu pour lui faire comprendre qu'il ne mélange pas amitié et tourisme.

-" Peut-être ‘pays', mais ta tribu est plus au sud que la mienne !”

 

Ma vie de marin de commerce (La lettre oubliée)

La lettre oubliée
Sortie nocturne non programmée

Sur le M /S Tigre, dans un petit port soi-disant tranquille d'Italie, une escale de mazoutage* nous oblige à y passer une nuit.

Chaque membre de l'équipage a sa fonction propre. Le mazoutage concerne les matelots et leur bosco, ainsi que l'officier de garde pour cette nuit précise. Tout le reste de l'équipage non requis par la manœuvre après son temps de travail journalier est entièrement libre et peut descendre à terre s'il en a envie.

Ce fut mon cas. Une lettre écrite en mer, qui sans cette escale aurait attendu officiellement sa saisie au prochain port afin d'y être acheminée avec toutes les autres pouvait prétendre, si je la postais ce soir, arriver bien avant toutes les autres à destination.

Le dîner terminé, me voici à terre juste poster cette fameuse lettre, et après, c'est juré, on rentre.

Dans tous ces petits ports, la ville n'est pas trop éloignée, ce serait bien curieux de ne pas trouver une boîte aux lettres rapidement.

En apercevant une au loin, de l'autre côté de la place, je m'y rends. Une bande de marins en sens inverse me croise et retourne au port. Ils ne sont pas de mon bord, mais j'en reconnais quelques-uns. L'un deux me remarque aussi.

-"Mais c'est Maurice, le Maître électricien des Messageries Maritimes, que fais-tu ici  vieille branche ?"

-"Tiens, Marcel, le graisseur de la Havraise, j'avais vu en effet un bateau de ta compagnie pas loin du mien sans savoir que tu pouvais être à bord".

Mes débuts dans la Marine Marchande se firent à la N.C.H.P. (nous prononcions neuchap), Nouvelle Compagnie Havraise Péninsulaire, et je m'y étais fait de bons copains, comme Marcel, ce graisseur.

De tous nos temps de navigation passés ensemble jadis, que de bons souvenirs, et je le retrouvais là ce soir, quelle chance.

Eux aussi avaient fait une courte escale de mazoutage, mais étant arrivés quelques heures avant nous, certains revenaient de terre comme Marcel et ses copains.

Plus question de se quitter, tous se mirent d'accord pour remettre ça comme on disait, fêter les retrouvailles. Et nous voici repartis en ville.

De boîtes en boîtes, de bars en bars, les retrouvailles furent excellentes, et ce n'est qu'au petit matin que je rentrai à bord, juste à temps pour la manœuvre de départ et, me changeant pour mettre ma tenue de travail, la fameuse lettre tomba par terre...

En fait d'avance, elle rejoignit les autres.

Boire ou poster son courrier, il faut choisir.

*Mazoutage : Faire le plein de carburant du navire en vue d'un long voyage sans escale prévue.

 

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